Interview

Franco Frattini, au Temps: Aider et ne pas imposer…!

Vous parlez d’un Maghreb libre et démocratique
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Comme l’a signalé M. Pietro Benassi (ambassadeur d’Italie à Tunis) au cours de la conférence, Franco Frattini avait la primeur d’être le plus jeune conseiller d’Etat dans l’histoire de la République italienne et le mérite d’assumer d’importantes responsabilités gouvernementales et au sein de l’Union européenne. Décoré à plusieurs reprises en Italie et à l’Etranger, il est également l’auteur de nombreux articles et publications en matière de Droit, Politique et Affaires étrangères.

Le Temps : vous parlez d’un Maghreb libre et démocratique; un partenaire qui traite d’égal à égal avec l’Europe…S’agit-il là d’une utopie ou d’un objectif tangible qu’on peut atteindre ?
Franco Frattini: Il faut tout d’abord que le Maghreb lui-même fasse un pas en avant, en terre d’intégration, en terre maghrébine. Et puis, l’Europe considère le Maghreb comme un véritable partenaire et non comme un problème…Après les Révolutions, je pense que le moment est venu pour que l’Europe considère le Maghreb comme une opportunité car après la faillite des régimes dictatoriaux, le monde occidental s’est réveillé et s’est aperçu de l’erreur commise en traitant avec ces dits régimes…On avait soutenu des dictateurs durant des dizaines d’années avec pour seul objectif, la Sécurité plutôt que les Droits et la démocratie. Je pense qu’actuellement il est question d’un partenariat d’égal à égal.

Comment l’Europe envisage –t-elle régler le problème de l’immigration clandestine? Vous avez parlé dans votre conférence d’une politique d’immigration et d’asile commune à l’Europe, laquelle ?
-Quand j’étais Commissaire chargé de l’immigration, j’avais lancé le plan d’une stratégie partagée, et puisque l’approche sécuritaire ne marchait pas, on a pensé à créer dans les pays d’origine et de transit, des opportunités en multipliant entre autres, les investissements européens vers les pays d’origine.

Où en est –on avec le statut de partenaire privilégié pour la Tunisie avec l’Union européenne?
-En ce mois de novembre, précisément la semaine prochaine, l’Union européenne va signer le statut de la Tunisie, la projetant comme partenaire privilégié de l’Europe.

La crise économique que traverse actuellement l’Italie est –elle de nature à réduire l’aide à la Tunisie ?
-Franchement, ça serait une erreur monumentale! La coopération a toujours été un instrument nécessaire et enrichissant pour la politique étrangère de mon pays… Donc, utile aussi bien pour l’Italie que la Tunisie ; notre voisin dont nous appuyons le consensus de transition démocratique.

Quelle est la situation des entreprises économiques italiennes résidentes en Tunisie, après le 14 janvier 2011?
-Les entreprises italiennes n’ont jamais quitté la Tunisie même dans les moments les plus difficiles qui ont suivi la date du 14 janvier 2011 et quand il y avait beaucoup de risques. On est en train de renforcer au niveau quantitatif.

Dans le secteur touristique, le nombre de touristes qui viennent de l’Italie a doublé cette année par rapport à l’année dernière…Il manque encore 20% pour arriver au niveau de 2010.
La montée du courant islamiste suite aux révolutions arabes, constitue-elle un handicap quant à l’avenir des relations entre les deux camps : l’Europe et l’Afrique du Nord ?
-Non ! Dans le cas où le parti islamiste au pouvoir voudrait participer à créer un Etat civil et démocratique! Vous savez, la Tunisie n’est pas l’Iran… Votre pays avance à pas sûrs sur la voie de la réalisation d’un processus de transition pacifique dont le succès serait un modèle à servir pour le monde arabe et islamique. Il me semble par ailleurs qu’il y a une coopération entre tous les partis (islamistes et laïcs) qui œuvrent ensemble au sein de la Troika ; une situation qui ferait de la Tunisie, un pays musulman où tous les droits et les différences seront reconnus.

Comment l’Europe compte-t-elle intervenir pour venir en aide aux pays arabes dans leur transition démocratique?
-Appuyer le processus de transition démocratique amorcé par le Printemps arabe, prôner la paix au Proche Orient et soutenir le rôle de la Ligue arabe dans la défense des droits de l’homme en Syrie représentent autant de défis pour une Europe régénérée. L’Italie ne ménagera aucun effort pour aider à la réussite de ce processus et permettre à la Tunisie de relever les défis socio-économiques.

Notre slogan est donc, «aider» et ne pas «imposer»; accompagner et ne pas mettre sur la table un genre de modèle à copier !


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